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La mécanisation de la taille

Machine de taille Pellenc © C. Gaviglio IFV SO

La mécanisation de la taille, même partielle, peut apporter un gain économique réel en diminuant drastiquement le temps de travail manuel nécessaire. Les machines de taille vont plus loin que de simples prétailleuses en coupant les sarments plus près du cordon, pour une taille à deux yeux francs complétée par une reprise manuelle rapide destinée à couper les départs de sarments latéraux ou situés sous le fil porteur. Une autre approche de cet enjeu économique consiste à mécaniser la descente des bois.

La taille mécanique : un enjeu économique avant tout

Quel que soit le mode de conduite envisagé, le poste de taille représente un coût important sur les exploitations, en raison du temps de travail manuel nécessaire pour la taille proprement dite, le tirage / la descente des bois, leur broyage, et éventuellement le liage des baguettes en guyot. La robotisation des opérations est une voie de réduction des coûts envisageable à long terme pour conserver les modes de conduite. Mais la mécanisation de la taille, même partielle, peut apporter un gain économique réel en simplifiant le mode de conduite et en diminuant drastiquement le temps de travail manuel nécessaire. Cela a commencé dans les années 1980 avec les prétailleuses, qui ont grandement réduit la pénibilité et le temps consacré au tirage des bois, surtout sur cordon, mais également sur guyot, en libérant les sarments des fils de palissage.
Les machines de taille d’aujourd’hui vont plus loin en coupant les sarments plus près du cordon, pour viser une taille à deux yeux francs dès le passage de la machine complétée par une reprise manuelle rapide destinée à couper les départs de sarments latéraux ou situés sous le fil porteur.

L’objectif est de limiter ce temps de travail manuel au strict minimum c'est-à-dire 8 à 12 heures par hectare contre 35 à 50 dans un schéma de conduite classique de la vigne.

Complémentaires (parfois combinées) des prétailleuses, ces machines ne s’adressent qu’à des cordons relativement bien tenus. En effet, pour que la mécanisation soit la plus efficace possible, quelques optimisations sont nécessaires en termes de conduite du vignoble.

Un vignoble adapté pour une mécanisation de la taille plus efficiente

Les machines de taille peuvent être utilisées sur tout type de cordon, mais lorsque l’on souhaite optimiser la mécanisation d’une telle opération, mieux vaut établir le vignoble de façon spécifique afin d’en tirer le plus de bénéfices en termes d’organisation du travail, de baisse des charges, et de pérennité du vignoble.

Pour faciliter le travail des machines près du cordon, le bon alignement de celui-ci paraît indispensable : cela permet de définir une hauteur de travail plus facile à maintenir que l’on dispose d’un suivi de cordon automatique ou pas. 

Ce mode de taille de la vigne a en général pour conséquence une augmentation de la charge en bourgeons sur la parcelle. Cela se traduit par des hausses de rendement si la parcelle peut le supporter, et génère des contraintes plus fortes sur le palissage qu’un mode de conduite classique. Si la résistance mécanique de l’ensemble (fil porteur, amarres, piquets) est insuffisante, le fil porteur sur lequel le cordon est enroulé peut à la longue faire des vagues, ce qui est plus compliqué à suivre avec la machine de taille ou ce qui engendre une hauteur de coupe très variable et potentiellement plus de temps de reprise manuelle si on souhaite un peu réguler la charge en bourgeons. 

Une bonne résistance mécanique des souches est importante pour la qualité de coupe et pour éviter les blessures (effort de traction sur la souche). Aussi est-il recommandé, dans le cas d’une nouvelle plantation, de faire solidariser les souches en allongeant le cordon d’une souche à l’autre.

La hauteur du fil porteur pour ce mode de conduite est sujette à discussion (port ouvert ou pas, etc…), mais dans une optique de réduction et de simplification des travaux manuels, l’ergonomie est un point à prendre en compte. Dans cette optique, relever le fil porteur pour ne pas avoir à se baisser lorsque l’on taille très vite est particulièrement intéressant.

Un établissement soigné du cordon pour limiter par la suite le nombre de sarments que la machine ne peut pas couper : au moment de la formation du cordon, les souches sont courbées sur le fil porteur ; leur courbure doit être progressive (pas d’angle droit) et l’épamprage du rayon de courbure, comme du tronc si possible définitif.  De cette manière, aucun sarment ne pousse en dessous du futur cordon sur lequel la machine intervient.

Le positionnement des piquets est important, tant en nombre (support de la charge) qu’en soin apporté à leur enfoncement par rapport au fil porteur dans le cas d’un port libre, pour limiter les chocs avec les éléments de coupe. 

Le résultat agronomique d’un tel mode de conduite dépend en grande partie de la charge en bourgeons restante après la reprise manuelle.

Des machines assez proches et quelques particularités intéressantes

Les machines se différencient par leur niveau de sophistication technique et la présence ou non d’un module de prétaille permettant de réaliser les deux opérations simultanément. Les modules de coupe et de suivi de cordon peuvent aussi varier selon les machines. Enfin, il y a le montage sur porteur, à l’avant de la machine ou en latéral pour la visibilité de la coupe. 

D’un point de vue général, les machines présentes sur le marché ont beaucoup de points communs : il s’agit de couper au dessus et sur les côtés d’un cordon, et dans le cas ou les fils de palissage sont conservés, d’écarter les éléments de coupe au passage des piquets.

Les éléments de coupe sont souvent des scies circulaires animées par des moteurs hydrauliques ou électriques (Pellenc). Leur usure est dépendante des conditions d’utilisation, mais le remplacement ou l’affûtage des scies est à prendre en compte dans les coûts. Ces scies demandent des vitesses de rotation élevées pour une coupe nette, et nécessitent la présence d’une centrale hydraulique. Il en résulte un bruit et des projections de bois importants, mais la capacité de coupe est forte. Il existe aussi des machines à barres de coupe alternatives, moins bruyantes et aussi moins puissantes face à du bois vieux de plusieurs années, pour lesquelles les projections sont quasi inexistantes.

Les dispositifs d’ouverture pour le passage des piquets sont la plupart du temps complètement mécaniques : des galets s’appuient et obligent l’écartement des supports des modules de coupe. Compte tenu de la faible vitesse d’avancement, les contraintes mécaniques sont acceptables.

Quelques sophistications sont apparues pour le suivi du cordon, que ce soit sur un plan latéral (CGC Agri) ou horizontal (Pellenc). L’objectif est de faciliter la conduite des machines en soulageant un peu l’attention du chauffeur qui doit maintenir la tailleuse près du cordon sans prendre trop de risques. C’est un facteur de précision et d’optimisation supplémentaire pour maintenir une hauteur de coupe assez basse et limiter le nombre de coups de sécateurs ultérieurs, mais cela permet aussi d’augmenter légèrement la vitesse de travail (jusqu’à 2,5 km/h), qui sans assistance particulière reste autour de 1,5 km/h.

Facteurs influençant l'intérêt de la technique : un investissement initial qui peut payer

Le résultat de la taille mécanique dépend de 3 grands facteurs : la machine, la parcelle et l’humain. 

En effet la machine intervient dans la précision du travail, le confort de l’opérateur et le débit de chantier, sans oublier l’aspect économique lié à l’investissement, variable en fonction de la présence d’un module de prétaille ou pas.

L’adaptation de la parcelle à la technique est un facteur clé, car s’il est possible de travailler sur de vieux cordons ou sur des parcelles en guyot transformées, la précision du travail et les optimisations permises par un établissement spécifique du vignoble ne sont pas atteints. Là aussi il est question d’investissement initial sur le palissage et la préparation du cordon. 

Enfin le facteur humain est déterminant sur plusieurs points, qui se combinent avec les précédents : sans assistance à la conduite et au suivi de cordon, il est plus difficile d’envisager la taille mécanique sur de grandes surfaces car la pénibilité est plus importante pour le chauffeur. Le temps de formation et de préparation des cordons à la taille mécanique ne doit pas être négligé, c’est un investissement supplémentaire. Enfin, le temps réellement consacré par les opérateurs à la reprise manuelle est un facteur de maîtrise des coûts lorsqu’il est limité, mais aussi un facteur de régulation de la charge en bourgeons, il y a donc un équilibre à trouver.

Mécaniser le tirage des bois, une alternative à la taille mécanique pour conserver le mode de taille

D’autres machines permettent de mécaniser spécifiquement le tirage et le broyage des sarments des vignes conduites en guyot, permettant aussi de substantielles économies tout en ne changeant pas le mode de taille et la charge en bourgeons laissée lors de la taille. Elles peuvent  intervenir sur des vignobles préparés pour que les fils du palissage puissent supporter les efforts de traction imposés. Le passage des machines présuppose que la taille (baguette, courson) a été effectuée.

Les constructeurs dans ce domaine sont Clemens, Ero, et Provitis.

Les différences de conception des machines tiennent à la façon de gérer le palissage et l’extraction des bois : par le haut, ou sur le côté, mais aussi au broyage, intégré ou non à la machine.